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compétitivité : l’heure des corrections ?

Cette année, l’Allemagne se dotera d’un salaire minimum légal alors que le gouvernement Valls accélère les allégements de cotisations pour les entreprises. Ces deux mesures pourraient atténuer les écarts de compétitivité entre les deux pays.

Un pied de chaque côté du Rhin

Christian Schneider, titulaire d’un doctorat en Sciences économiques, est expert-comptable et commissaire aux comptes certifié à la fois en France et en Allemagne. Il a travaillé pour KPMG des deux côtés du Rhin, avant de fonder son propre cabinet à Strasbourg en 2012. Depuis, il travaille avec des filiales françaises de groupes allemands, notamment dans l’industrie.

 

Débranchez votre portable, éteignez la musique. Tous vos neurones se connectent ? Bien. Nous en aurons besoin pour décortiquer cette épineuse question : l’effet conjugué de la mise en place d’un salaire minimum en Allemagne et des réductions de charges sociales en France va-t-il améliorer la compétitivité de notre économie ?

Elle se pose d’autant plus qu’après des années de modération salariale, les entreprises allemandes augmentent enfin leurs employés, suite à la pression des syndicats. Résultat: entre2011 et2013, le coût horaire du travail (1) a crû de 2,7% Outre Rhin contre 1,9% dans l’Hexagone. Il s’établit respectivement à 31,70€ de l’heure contre 35€. Cette réduction des écarts entre coûts salariaux se combine avec la mise en place progressive, entre 2015 et 2017, d’un salaire minimum en Allemagne. Fixé à 8,50€ brut de l’heure (9,50€ en France), il concernerait 5,2 millions de salariés (2).

« De nombreuses entreprises possèdent déjà leurs propres salaires minimums, déterminés par leurs accords de branche. Il est parfois plus élevé que le seuil légal. Et les secteurs dans lesquels ce n’est pas le cas auront deux ans pour s’aligner, » complète Christian Schneider, expert-comptable et commissaire aux comptes franco-allemand.

Des facteurs de rééquilibrage

Côté français, le Pacte de responsabilité du gouvernement de Manuel Valls, voté en avril dernier, prévoit d’exonérer les salariés au niveau du SMIC du paiement des cotisations patronales en 2015. Hausse des coûts d’un côté + baisse de l’autre = rééquilibrage compétitif ? La balance penche vers le oui, avec toutes les précautions que demandent une projection sur des économies aussi différentes que celle de la France – basée sur les services (3), la demande intérieure et de grands groupes mondialisés – et celle de l’Allemagne, misant sur l’industrie, l’export et un nombre très important de moyennes entreprises.

© Dorothée Parent

La demande intérieure allemande comme effet d’entraînement

Disséquons les salaires supérieurs au SMIC. Toujours dans le cadre du pacte de responsabilité, ils bénéficieront de baisses de cotisations patronales en 2015 ou 2016 (4). Les travailleurs indépendants assisteront à une diminution de trois points de leurs cotisations familiales. Si l’on y ajoute les mesures du Crédit d’impôt emploi compétitivité (CICE) et d’autres allègements de la fiscalité des entreprises, ce montant atteint 30 Md€ d’ici à 2017. Bref, combinées avec le «rattrapage» allemand en termes de coût du travail, « ces mesures peuvent rééquilibrer l’attractivité des deux pays comme lieux d’investissement. L’Allemagne va aussi y gagner en pouvoir d’achat, » reprend Christian Schneider, qui y voit des opportunités de nouveaux marchés et un effet d’entraînement positif non seulement sur la France mais aussi sur l’Europe.

L’Alsace plus attractive?

Quid de l’Alsace ? Comme le reste du territoire, ses entreprises bénéficieront du Pacte de responsabilité. Mais la région aura-t-elle plus de chances qu’une autre d’attirer des entreprises étrangères ? Soyons honnête, il est quasi-impossible de se prononcer car une multitude d’autres facteurs entrent en compte, comme les infrastructures, le niveau de formation des travailleurs, la visibilité économique, etc. Le coût du travail à lui seul ne fait pas tout. Quant à l’arrivée massive d’entreprises allemandes en Alsace, Christian Schneider reste sceptique : « Dans les années 2000, beaucoup d’entre elles se sont retirées du territoire comme lieu de production. Mais je doute qu’on assiste au mouvement inverse. L’Alsace n’est plus vue comme l’unique porte d’entrée sur le marché français et elle est en train de perdre son avantage linguistique. »

L. D.   

(1) Le coût horaire du travail inclut rémunérations, cotisations sociales et exonérations de charges. Source: Statistisches Bundesamt (Destatis), «E-Vergleich der Arbeitskosten 2013: Deutschland auf Rang sieben», 12 mai 2014.

(2) Source: Institut allemand pour la recherche économique (DIW), «Gesetzlicher Mindestlohn: Zahl der Anspruchsberechtigten könnte sich bis zum Jahr 2015 nahezu halbieren», janvier 2014.

(3) Le secteur des services représente 79% du PIB en France contre 69% du PIB en Allemagne. Au contraire, l’industrie contribue à hauteur de 31% du PIB allemand, contre 19% en France. Source: Banque mondiale, données de 2012.

(4) Baisse de 1,8 % des cotisations familles jusqu’à 1,6SMIC en 2015, puis jusqu’à 3,5 SMIC rn 2016.Source : gouvernement.fr « La mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité » 9 avril 2014

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