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Wolfgang Grenke : président de l’industrie und handelskammer (iHK) karlsruhe vice-président eurochambres

« L’Alsace est la porte d’entrée du marché français »

La CCI et les IHK du Rhin Supérieur ont décidé de renforcer la coopération transfrontalière. Quels sont à votre avis les sujets les plus importants?

W. G.• Nous n’utilisons plus le terme coopération «transfrontalière», car il comporte encore la notion de «frontière». Nous préférons parler de «coopération transrhénane» ou «coopération au-delà du Rhin», ce qui se réfère sémantiquement aussi à la construction de ponts.

Cette construction de ponts est importante pour nous à plusieurs niveaux. Nous avons urgemment besoin d’un deuxième pont sur le Rhin à Karlsruhe, pour que les frontaliers du nord de l’Alsace puissent rejoindre aisément Karlsruhe. Autre sujet, le tourisme qui place la région du Rhin Supérieur parmi les meilleures en Europe. Dans ce domaine, nous devons nous considérer comme une région européenne unique, mais cela nécessite, que nous disposions des infrastructures qui nous permettent de nous rendre facilement chez nos voisins.

Cela concerne également la coopération entre nos deux aéroports, le Baden Airpark et Strasbourg-Entzheim. Peut-être sera-t-il possible que ces deux plate-formes complètent mutuellement leurs destinations afin de mieux connecter la région avec les destinations internationales? Un autre point est le développement du numérique, et en particulier l’Intelligence Artificielle. Dans ce domaine, il sera important de développer la coopération franco-allemande.

En tant qu’entrepreneur de chaque côté du Rhin, quel regard portez-vous sur l’économie alsacienne?

W. G.• L’économie alsacienne est un partenaire important pour l’économie badoise. Par le passé, nous avons fait avancer d’importants projets communs de coopération franco-allemande et nous avons su établir une confiance mutuelle.

J’ai pu faire cette expérience dans ma propre entreprise, la Grenke AG. Notre siège se trouve à Baden-Baden et notre siège français, la Grenke Location, à Schiltigheim. Pour notre économie, l’Alsace représente la porte d’entrée du marché français et cela est également valable dans le sens inverse.

Le Bade Wurtemberg souffre d’une pénurie de main-d’œuvre alors qu’en Alsace le taux de chômage reste élevé, surtout chez les jeunes. Que faire pour favoriser la mobilité transfrontalière ?

W. G.• Dans le Pays de Bade, de nombreuses entreprises souhaiteraient proposer une place d’apprenti ou embaucher de jeunes Alsaciens. Pour créer des liens entre eux et nos entreprises, la CCI Karlsruhe a développé le programme «Les classes sortent en boîte» en coopération avec la CCI Alsace Eurométropole.

De plus, nous organisons tous les ans un grand salon de la formation «Entrée dans la vie professionnelle» («Einstieg Beruf») à Karlsruhe où nous accueillions de nombreux jeunes Alsaciens, souvent accompagnés par leur famille. Ce rapprochement nécessite en tout premier lieu de faciliter la mobilité.

Si un jeune Alsacien souhaite venir dans le Pays de Bade, mais qu’il n’a pas la possibilité de traverser le Rhin pour se rendre sur le lieu de travail ou de formation aux horaires requis, cela refroidit sa motivation. Pour cela nous devons trouver des moyens pour réactiver des liaisons ferroviaires abandonnées.

L’étude de faisabilité déjà décidée par l‘Eurodistrict Pamina concernant la réactivation de la ligne sur le pont du Rhin de Wintersdorf constitue un pas dans la bonne direction.

Vous êtes le vice-président d’Eurochambres. Quelles sont ses missions?

W. G.• Eurochambres est la fédération européenne des chambres. Elle est en charge de la concertation entre les différents réseaux consulaires des états membres, mais aussi et surtout, de la représentation des intérêts de l’économie auprès des institutions européennes à Bruxelles.

Tous les états membres de l’Union ne sont pas membres d’Eurochambres, mais plusieurs non-membres de l’UE y sont représentés, par exemple la Turquie. Ceci permet de maintenir le dialogue par le biais des relations économiques, même si la situation politique n’est pas au beau fixe. Notre mission principale consiste à dynamiser le marché intérieur européen, le plus grand marché intérieur du monde.

Nous ne nous focalisons pas sur les relations bilatérales comme entre la France et l’Allemagne, mais sur des thématiques européennes comme par exemple le traité sur le libre-échange TAFTA avec les états-Unis, le Brexit ou les droits de douane qu’appliquent les Etats-Unis sur des importations en provenance de l’Europe.

Ces questions, nous les discutons dans une perspective européenne et nous défendons nos positions auprès des institutions de l’UE qui les intègrent dans les négociations. La promotion de notre système d’apprentissage au niveau européen constitue aussi un sujet très important, tout comme la lutte contre la bureaucratie.

* BWIHK: association des 12 chambres de commerce du Baden-Württemberg

Propos recueillis par Patrick Heulin

06/09/2018Partager