Commerce de centre-ville : réenchanter le client

Comment revitaliser les centres-villes en perte de vitesse à l’ère du commerce sur internet et face à la concurrence des surfaces commerciales en périphérie ? En bâtisseur, la CCI Alsace Eurométropole imagine de nouvelles stratégies territoriales pour le commerce en associant tous les acteurs de la ville : commerçants, associations, entreprises, communes et communautés de communes. L’enjeu : accompagner la mutation en cours et construire le centre-ville de demain par des solutions souvent simples et pragmatiques. Dossier réalisé par Éric Pilarczyk

 

Le constat est sans appel. Depuis une décennie, les « dents creuses » commerciales gagnent du terrain et le taux de vacance progresse inexorablement d’environ 1 % chaque année dans les centres-villes. Sur l’ensemble de l’Alsace, notamment dans les petites villes et celles de 50 000 à 100 000 habitants, le commerce de centre-ville est en net recul. Comment expliquer cette tendance négative ?

© JR Rutter

Les motifs invoqués sont connus : développement des mètres carrés commerciaux en périphérie, explosion du commerce sur internet, perte du pouvoir d’achat des consommateurs. Ces facteurs pèsent largement mais d’autres processus plus complexes interviennent dans la dévitalisation commerciale des cœurs de ville qui n’est que le symptôme le plus flagrant d’un phénomène plus large : diminution de la population, vacance des logements, baisse du niveau de vie ou encore dégradation de l’espace public.

Un maître-mot : se différencier

REPÈRES

20 000

Plus de 20 000 établissements dédiés au commerce en Alsace et près de 80 000 emplois.
100
Près d’une centaine d’associations et d’unions commerciales en Alsace.
12 %
C’est en moyenne le taux de vacance commerciale en France.

Ce déclin du commerce en centre-ville est-il une fatalité ? « Non, répond Aziz Derbal, responsable du commerce à la CCI Alsace Eurométropole. À condition d’insérer la politique commerciale dans une politique globale de la ville. Cela signifie jouer à la fois sur le logement, l’amélioration de l’espace public, l’accessibilité, continuer à en faire un lieu de centralité en maintenant la présence de services publics et de maisons médicales qui stimulent la fréquentation.

C’est le sens du travail que nous menons depuis deux ans avec les commerçants, les responsables d’associations et les acteurs publics dans une vision à 360° qui prend en compte tous les éléments d’analyse : les déplacements, l’habitat, les services. » Propos soutenus par l’expert David Lestoux, directeur du cabinet Lestoux & Associés qui accompagne la CCI dans sa réflexion et la recherche de nouvelles pistes. « Elles sont souvent simples et pragmatiques, ajoute David Lestoux. Elles sont en tout cas nécessaires pour répondre aux nombreuses mutations de la société et aux évolutions des comportements d’achat des consommateurs. » Et dans le contexte actuel, qui se caractérise par une offre de mètres carrés commerciaux supérieure à la demande, la question de la « différenciation » est déterminante.

Il est essentiel de maintenir les équipements créateurs de flux en cœur de ville. © Jean-François Badias

Sept défis à relever

« Elle est au cœur de la feuille de route partagée par la CCI avec les professionnels et les collectivités et s’articule autour de sept grands défis », complète Aziz Derbal. Il s’agit d’abord d’assurer la densité commerciale - en évitant les ruptures et en favorisant la continuité du linéaire par l’addition de commerces - de manière à générer du trafic, développer l’activité et créer l’attractivité par un effet de pôle.

Second enjeu : travailler l’effet de vitrine qui donne envie de s’arrêter en centre-ville. Si la collectivité a son rôle à jouer en matière d’aménagement, les commerçants doivent affirmer l’identité des façades, s’adapter aux nouveaux horaires de la clientèle, développer les services comme le click and collect et bien sûr soigner les vitrines numériques, deuxième porte d’entrée dans le magasin. Le programme de la CCI pointe également l’amélioration de l’accessibilité du centre-ville avec davantage de fluidité et de sécurité : gérer le dernier kilomètre, ne pas opposer transports collectifs et automobiles, passer d’une logique de route à une logique de rue, créer du confort à travers les sens de circulation, pratiquer la piétonisation à temps partagé.

Le quatrième défi vise à gérer l’immobilier commercial face à la multiplication des locaux vacants et la hausse des loyers. Principal levier : prospecter les enseignes pour les inciter à s’installer et sensibiliser les propriétaires de locaux à la nécessaire dynamique commerciale. Autre priorité : mieux organiser le stationnement pour rendre le parking attractif. Comment ?

En développant les services - places familiales, applis en temps réel -, en réduisant la distance psychologique avec les commerces et en adaptant l’offre au type de commerce et au temps d’achat. À l’ère d’internet, l’objectif est aussi de réenchanter le client en améliorant l’ambiance d’achat et le confort pour la qualité de « l’expérience client ». Le design urbain, l’éclairage, l’offre bars et restaurants, les marchés participent à cette « expérience client ».

Enfin, il est essentiel de maintenir les équipements créateurs de flux comme les services médicaux, les lieux culturels ou encore les pépinières d’entreprises en cœur de ville. Les emplois font les emplettes. « Nous avons lancé, cet été, une démarche pilote avec l’Eurométropole de Strasbourg et la communauté de communes de Saverne-Marmoutier-Sommerau, précise Aziz Derbal. D’autres vont suivre dans le Bas-Rhin et le Haut-Rhin. Indéniablement, le commerce de centre-ville dans notre région a des raisons d’espérer. »

Direction Commerce
Aziz Derbal • 03 88 75 25 60 • a.derbal@alsace.cci.fr

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