Romina Marcovici : Directrice des opérations industrielles Merck Molsheim

Vous êtes la première femme, en 50 ans, à diriger le troisième site du plus grand groupe pharmaceutique au monde. Y a-t-il, selon vous, un management masculin et un féminin ?

Ce sont davantage des traits de personnalité, des valeurs qui vont déterminer le style de management, plutôt que le genre. Quand mon prédécesseur a pris sa retraite, il lui importait que son successeur partage les mêmes valeurs que lui. Je pense que nous partageons et déployons un style de management tourné vers la prise en compte de l’humain, l’écoute et la bienveillance. Avec plus de 2 300 personnes sur site, on fonctionne comme un « beau village » riche de ses diversités de pensées, de réflexions, de points de vue, de parcours, d’expériences et de visions d’avenir.

Vous avez été membre dirigeante du programme « Women in leadership ». En quoi ça consiste ?

Depuis ma nouvelle prise de fonction, je me suis retirée du programme pour représenter l’ensemble des collaborateurs. En 2018, nous avons créé ce mouvement qui vise à faire évoluer la place des femmes dans la société et à tendre vers un objectif de parité dans les postes à responsabilités, jusqu’ici plutôt occupés par nos homologues masculins. Le but était de fédérer un réseau de femmes en position de leadership, de casser les stéréotypes, les résistances et de libérer la parole. Sur les trois dernières années, on a pu constater une évolution en termes de représentativité des femmes à des postes de direction. Donc, le pari est plutôt gagné !

Sur le site Merck de Molsheim, vous avez lancé une campagne de communication « I’m an Ally »* destinée à lutter contre les discriminations et à promouvoir l’inclusion au travail. De quelles façons ?

’expérience « Women in Leadership » a ouvert la voie au réseau LGBTQ. Cette démarche s’inscrit dans un même objectif de diversité et d’inclusion. Peu importe les différences de genre, de préférence, d’orientation sexuelle, de religion, de race, de situation, de handicap, chacun a sa place sur ce site. Des activités appelées « Nous aussi » permettent à des personnes en situation de handicap ou qui ont été confrontées à la maladie de témoigner de leur parcours et de sensibiliser toute une communauté à leur cause. Ces échanges d’expériences confortent le salarié dans l’idée qu’il est pris en considération en tant qu’individu dans sa globalité et pas juste en tant que ressource humaine.

Ces cinq dernières années, plus de 400 collaborateurs ont été embauchés à Molsheim, dont certains par la méthode « sans CV ». Pourquoi avoir choisi cette méthode de recrutement ?

Sur les cinq dernières années, on a procédé à 400 embauches et l’année dernière on a lancé la construction d’une nouvelle usine sur le site qui requière à terme 350 opérateurs supplémentaires. Avec le soutien de la ville de Molsheim, de la Région, de l’ADIRA, de Pôle Emploi et de partenaires comme Ease, on a construit tout un nouveau parcours de recrutement « sans CV » pour répondre à l’urgence de la situation et au volume de recrutement. On a réussi à s’affranchir d’un certain nombre d’échecs en se recentrant sur les capacités, les habiletés, les savoir-faire et le savoir-être des candidats, au-delà d’un simple bout de papier, premier filtre entre eux et l’entreprise. Aujourd’hui, près de sept nouvelles recrues sur dix, pour certaines en reconversion professionnelle, restent dans l’entreprise. Bien plus qu’auparavant. > Propos recueillis par Dorothée Keller
* « Je suis un allié »

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