Après-crise, e-commerce, écologie : logistique : l’année de tous les défis

Une conjoncture imprévisible, des livraisons plus vertes et une automatisation toujours plus poussée : la supply chain fait face à des défis majeurs. Objectif pour ce secteur clé de l’économie française : se réinventer pour gagner en compétitivité et répondre aux exigences des entreprises clientes à la fois sur le coût de la prestation et la garantie du délai. Quelles sont les solutions développées par les acteurs de la filière en Alsace ? Quel impact dans les entreprises et quelles sont les stratégies logistiques payantes ? Rencontres et témoignages dans ce dossier.

Encore un effet de la crise sanitaire. En quelques mois, l’e-commerce a fait un bond de plusieurs années et les chaînes logistiques connaissent une effervescence exceptionnelle. Le phénomène impacte tous les acteurs de la filière qui doivent aussi intégrer les nouvelles exigences des clients. Spécialiste de la logistique des produits pharmaceutiques et des dispositifs médicaux, en particulier en Alsace, le groupe Rhenus Logistics a anticipé ces tendances. « De façon générale, les attentes des clients évoluent surtout au niveau des délais et de la rapidité de l’acheminement des marchandises, explique Mercedes Ortiz Garcia, directrice du Business Développement. Quand un client commande sur internet, il veut recevoir ses produits au plus tôt, mais c’est surtout la garantie du délai qui lui importe. C’est un point crucial sur lequel travaillent nos équipes. Par exemple, nous déployons des chariots de transfert autonomes sur certains entrepôts qui optimisent la préparation de commandes et facilitent les transferts de produits entre deux postes. Nous utilisons également des robots de nettoyage pour répondre aux attentes de nos clients en matière d’hygiène. La crise sanitaire et le développement du e-commerce accélèrent la mutation de notre activité. En 2020, nous avons ouvert un nouvel entrepôt de 12 600 mètres carrés sur le port de Strasbourg et décidé la construction d’une autre plate-forme entièrement dédiée au stockage à froid. »

Toujours plus d’automatisation des process

Avec le boom du e-commerce, l’automatisation de la préparation des commandes est devenue un enjeu stratégique pour les entreprises de la logistique. © Adobe StockÀ Molsheim, la société KAP Logistique s’est positionnée à 100 % sur l'e-commerce. « Cette tendance s’est installée à un niveau structurel élevé et durable, confirment Florence et Thierry Kappler, les dirigeants de l’entreprise, qui emploie seize personnes. L’impact sur la logistique est massif et notre activité a doublé en un an. Le développement, oui. Mais pas au détriment de notre modèle social. Nous avons fait le choix de la proximité et de la réactivité en assurant un traitement des commandes sous 24 heures. Nous privilégions le contact personnel avec les e-commerçants. Et nous sommes spécialisés dans le picking (préparation de commandes), co-packing (regroupement de produits), ainsi que dans l'expédition de petits colis tant en cosmétiques, ampoules, épicerie sèche que bien d'autres. Le défi pour nous est d’adapter notre structure à la progression de nos clients et la saisonnalité de leurs ventes. Il s’agit maintenant d’accroître nos performances dans la préparation de commandes, en automatisant davantage les process et en nous appuyant sur notre certification qualité. » Pas de doute : la filière est à un tournant. Les chaînes logistiques doivent aujourd’hui s’adapter au cross-canal afin de passer rapidement d’un modèle de distribution vers les magasins à d’autres formes de livraison en drive, en points relais et à domicile. Dans ce secteur aussi, la transformation digitale est pied au plancher. Et pour les acteurs, qui en disposaient déjà, les solutions de gestion d’entrepôt, tri mécanisé des marchandises, planification des schémas de transport et gestion de tournées se sont révélées précieuses. L’étape suivante pour les logisticiens, en particulier dans le transport maritime et fluvial : tendre vers le concept de guichet unique. Des solutions digitales et collaboratives émergent pour permettre aux autorités portuaires de coordonner les différents processus liés à l’arrivée du bateau. Le défi écologique mobilise également les acteurs de la filière fluviale.

Des drones au cargo souterrain : l’innovation est partout

chiffres-clés
1,8 million
En France, la filière logistique pèse 1,8 million d’emplois (quatre fois plus que la filière automobile) et représente 10 % du PIB national.
(Source : Insee)

78 000
Dans le Grand Est, la logistique regroupe 5 800 établissements et plus de 78 000 salariés.
(Source : OREF Grand Est)

20 %
Au cours des cinq dernières années, l’activité logistique
a progressé de 20 % sur le
territoire de l’Eurométropole
de Strasbourg.
(Source : OREF Grand Est)

« Les contraintes environnementales et financières jouent en faveur du développement du trafic conteneurs par voie d’eau, souligne Isabelle Arnold, directrice commerciale des Ports de Mulhouse-Rhin. Quand un bateau remplace plus de 200 camions, il élimine en même temps les nuisances sonores et réduit la pollution atmosphérique. La congestion des infrastructures portuaires maritimes entraîne également un délestage au profit des ports fluviaux. L’enjeu pour nous est donc d’accélérer le développement des plates-formes du Sud Alsace et surtout de dynamiser l’activité conteneurs avec l’apport de nouveaux clients et services. »

À l’EuroAirport Bâle-Mulhouse, l’heure est aussi au redéploiement et à l’innovation. « Nous sommes en train de finaliser une étude d'opportunité qui nous permettra de faire partie d’un réseau européen de drones pour l’activité de livraison de colis, décrit Claire Freudenberger, responsable communication. Cela implique un partenariat avec une start-up européenne. L’objectif est à la fois d’intégrer les évolutions technologiques et de réduire l’impact carbone. Nous participons également à un groupe de travail régional afin d’étudier le possible raccordement de la plate-forme à un projet de cargo souterrain. Et nous sommes très avancés sur un programme « cross-docking » qui permettra de traiter la marchandise pharmaceutique à température contrôlée. Ce type d’infrastructures est rare sur les sites aéroportuaires. »

Logistique urbaine

Livrer plus propre et plus vert, c’est surtout une exigence en milieu urbain. Véhicule électrique ou gaz naturel pour véhicules (GNV), vélo-cargo, triporteur : la révolution des modes doux s’accélère dans la logistique urbaine. La livraison du premier et du dernier kilomètre, Urby en a fait sa spécialité. Basée à Strasbourg, cette filiale du groupe La Poste propose un nouveau modèle en fonctionnant comme centre de mutualisation et de stockage des services et des marchandises, auquel s’ajoutent des prestations de collecte de déchets et d’emballages. « L’idée est de stopper les camions à l’avant-dernier kilomètre, puis de massifier la livraison en centre-ville grâce aux modes doux zéro émission, comme notre flotte de véhicules électriques en propre, précise Denis Steinmetz, président de la société. Notre valeur ajoutée, c’est l’ultra-rapidité, la livraison à domicile et la qualité du service. Nous partageons une charte de qualité avec nos sous-traitants et notre personnel en propre. » Pour Urby, ce positionnement dans la logistique urbaine répond aussi aux futures réglementations qui limiteront l’entrée des véhicules thermiques dans les cœurs de ville. De même, la société Urban Logistic Solutions (ULS) exploite un service innovant de livraison vers le centre de Strasbourg, combinant transport par péniche et vélo-cargo électrique. La filière logistique n’a pas fini de se renouveler.

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