Intelligence artificielle (IA) : (R)évolution en cours

Capteurs, algorithmes, automates : l’intelligence artificielle est sur toutes les lèvres et s’invite déjà dans notre quotidien, dans les bureaux et les ateliers. Révolution technique, humaine et organisationnelle, l’IA n’est plus un luxe, mais une nouvelle manière de travailler et un facteur clé de compétitivité. Vision, stratégie, méthodologie, éthique, traitement des données, place de l’humain : l’avenir de l’intelligence artificielle s’écrit à tous les étages de l’entreprise. Tour d’horizon des avancées dans notre région qui se positionne en territoire d’excellence.

@ Adobe Stock & iStockTout va très vite. Trop vite ? Pour nombre de PME, passer d’une intelligence artificielle expérimentale, basée sur quelques cas d’usage à une IA opérationnelle, soluble dans la vision à long terme de l’entreprise et dont le rôle est compris par l’ensemble de ses équipes est à la fois un défi et un enjeu stratégique. Aujourd’hui, les grands acteurs industriels sont les plus avancés dans ce domaine. Supply chain, process industriels ou contrôle qualité utilisent des technologies d’IA, qu’il s’agisse d’inspection visuelle ou de maintenance prédictive. La plus innovante de ces technologies est le deep learning. Elle s’appuie sur des algorithmes extrêmement puissants qui imitent l’intelligence humaine et préfigure de nouvelles percées en matière d’automatisation industrielle et d’amélioration des systèmes qualité. Parée des plus belles vertus, l’IA est un levier essentiel pour répondre à une préoccupation majeure des entreprises : la compétitivité. Pour concurrencer les pays à bas coûts, les entreprises n’ont d’autre choix que d’accélérer leur transformation numérique. Un cercle vertueux apparaît. La technologie crée de nouveaux usages qui créent de nouveaux business models et de nouvelles opportunités d’investissement.

Chiffre clé

85%

Près de 85 % des dirigeants français pensent que la survie de leur entreprise est en jeu s’ils ne parviennent pas à déployer l’intelligence artificielle à grande échelle d’ici cinq ans. Dans le même temps, les organisations capables d’industrialiser l’IA affichent des retours sur investissement trois fois supérieurs à leurs concurrents.


À l’avant-garde des solutions IA

Les collectivités l’ont bien compris et poussent les entreprises à s’approprier cette transformation. La Région Grand Est déploie son plan IA autour de cinq objectifs : booster la compétitivité des entreprises par l’intelligence artificielle, soutenir l’excellence scientifique, dynamiser les start-up, développer les compétences en IA, garantir une IA éthique, transparente et inclusive. Son ambition est de mobiliser 350 millions € sur cinq ans et son action s’appuie sur deux grands ressorts : l’institut régional « Grand Est 4 IA » et la convention d’affaires « 360 Grand Est » orientée solutions et dispositifs d’aide pour relever le défi du numérique et de l’industrie 5.0. L’agence régionale d’innovation Grand E-Nov+ et la CCI Grand Est sont les relais de ce plan inscrit dans le Business Act Grand Est. Sur le terrain, les avancées sont multiples et des sociétés se positionnent à l’avant-garde des solutions IA. Spécialisée dans le domaine de la vision industrielle, Cevilog développe un logiciel basé sur les algorithmes de deep learning. « Cela permet de répondre à des applications industrielles complexes comme la vérification des assemblages ou la détection de défauts aléatoires, explique Christian Brandt, dirigeant de Cevilog. Les solutions d’inspection visuelle permettent un contrôle qualité de 100 % de la production, une élimination des défauts et une optimisation du process de fabrication. C’est une plus-value considérable pour les entreprises qui peuvent contrôler l’ensemble de leur production et non plus un seul échantillonnage. »


Un enjeu clé : les méthodes et compétences associées

L’IA permet notamment le contrôle en temps réel de produits en cours de fabrication. © Adobe StockL’intelligence artificielle s’est également immiscée dans le secteur de la santé jusqu’à le transformer. À Strasbourg, le professeur Luc Soler a fait de Visible Patient un modèle de laboratoire numérique d’analyse des images médicales. Un concept révolutionnaire qui permet de simuler une thérapie avant de la mettre en œuvre. De son côté, la société Sikim capitalise son savoir-faire dans les assistants virtuels intelligents pour investir le secteur prometteur de la téléconsultation. « Avec Okédoc, nous développons une solution digitale qui assure le suivi des patients atteints de maladies chroniques comme la sclérose en plaques, décrit Florent Paris, directeur du développement chez Sikim. Cet assistant virtuel répond 24 heures sur 24 aux questions du patient et livre des indications thérapeutiques pour l’aider à vivre avec sa maladie. » Le secteur bancaire aussi se réinvente en combinant expertise humaine et fonctionnalités digitales.

AIDA accélère le rythme


Un lieu d’excellence en matière d’intelligence artificielle et d’analyse des données pour l’industrie : c’est l’objectif d'AIDA, un consortium constitué par des entreprises industrielles régionales comme Endress-Hauser, Sauter Regulation, Clemessy, Socomec et Bürkert. Réuni au sein du KM0 à Mulhouse, il vise notamment à accélérer le rythme de la transformation numérique en expérimentant et en partageant les technologies IA disponibles et adaptées. Cette initiative s’inscrit dans le Business Act Grand Est.

Le déploiement des assistants virtuels tournant à l’intelligence artificielle, disponibles 24 heures sur 24, est une étape de plus dans la transformation de la relation clients. Le Cetim Grand Est, centre de ressources technologiques, est également un appui précieux pour les PME. Ses travaux portent sur l’expérimentation et l’utilisation de l’IA dans les métiers industriels. « Nous mettons, par exemple, en avant des applications de contrôle en temps réel de produits en cours de fabrication, précise son directeur général, Olivier Rougnon-Glasson. La mise en pratique de l’IA en milieu PME-PMI est un véritable défi car si les outils existent, les méthodes et les compétences associées doivent encore être développées. »
Aux apporteurs de solutions s’ajoute la collaboration avec les universités en réponse à un enjeu crucial de la transformation numérique : la production et l’exploitation des données. L’école d’ingénieurs Télécom Physique Strasbourg et le laboratoire de recherche ICube, au sein de l’Université de Strasbourg, ont lancé la chaire industrielle Science des données et intelligence artificielle avec le concours de six mécènes : Crédit Mutuel, Heppner, Hager Group, ÉS, Socomec et 2CRSI. Elle a pour objectif de former les data scientists de demain, ces spécialistes du « big data » et de la modélisation des données, et ainsi accompagner la montée en puissance de l’IA dans les entreprises.
Libérées d’une part d’incertitude grâce à l’écosystème qui se met en place, les entreprises alsaciennes peuvent se concentrer sur le fond : se mettre à niveau et intégrer davantage l’intelligence artificielle dans leurs processus. « L’évolution est graduelle, reconnaît Frédéric Wickert, fondateur d’A.I. SENSE. Notre rôle est d’aider les entreprises à démystifier l’IA et à élever leur conscience numérique. Nous organisons notamment des formations en ligne autour des enjeux et des applications de l’IA. Nous assistons à une véritable révolution. La vitesse et la puissance montent en flèche et bousculent l’ordre des choses. L’enjeu est d’accompagner les entreprises dans cet effort d’adaptation culturel et organisationnel inédit. » > Eric Pilarczyk

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